Le 6 mai 2019, la cour des comptes a été saisie par le Premier ministre en vue de dresser « un état des lieux de la fraude fiscale et de son montant en proposant un chiffrage dont la méthode pourrait être reproduite dans l’avenir pour suivre l’évolution du phénomène dans le temps ». L’objet de ce rapport est de réaliser une enquête relative à la fraude fiscale.


La fraude fiscale consiste à contourner illégalement la loi, donc l’impôt. La frontière est mince entre la fraude fiscale, l’optimisation et l’évasion fiscale. Afin de comprendre le sujet du rapport de la cour des comptes, ces différentes notions doivent être définies.
La fraude fiscale est décrite à l’article 1741 du code général des impôts, elle implique une violation délibérée de la réglementation en vigueur. A contrario, l’optimisation fiscale désigne le fait pour un contribuable de choisir, parmi les possibilités offertes par la loi, celle qui apparaît la moins coûteuse, il s’agit d’un comportement légal. L’évasion fiscale, elle, qualifie l’ensemble des opérations destinées à réduire le montant des impôts, les moyens utilisés sont légaux, cependant le but est illégal et peut être constitutif d’un abus de droit. La difficulté est donc de définir si un comportement doit être qualifié d’optimisation, de fraude ou d’évasion.

Il s’agit donc de comprendre l’étendue de la problématique de la fraude fiscale par le biais du rapport de la cour des comptes. Ainsi, le présent article mettra en lumière les conclusions du rapport 2019 de la cour des comptes qui rappelle l’urgence d’une action contre la fraude fiscale (I), tout en notifiant des recommandations nécessaires afin de mener à bien cette mission (II).

L’urgence dans l’action contre la fraude fiscale décriée le rapport 2019 de la cour des comptes

Un chiffrage inédit

Entre 2013 et 2018, les sommes recouvrées grâce au contrôle fiscal ont chuté de 22% passant de 10 à 7.8 milliards d’euros. Or, en 2018, ces sommes étaient 2,5 fois moindres qu’en Allemagne et 2 fois moindre qu’au Royaume-Uni.

La cour est parvenue à réaliser un chiffrage inédit concernant la fraude à la TVA. L’estimation du coût de la fraude à la TVA est d’une quinzaine de milliards d’euros, ce chiffre est nettement supérieur aux estimations publiées chaque année de la Commission européenne de 8.9 milliards d’euros en 2018.

Ce chiffrage apparaît inquiétant, pour cause, le cadre juridique de la lutte contre la fraude se révèle inefficace pour la cour des comptes.

Les foyers de fraude fiscale

Les foyers de fraude fiscale

La cour des comptes a identifié plusieurs foyers de fraude fiscale. Parmi eux, le développement du commerce en ligne qui a généré des opportunités de fraude importantes en matière de TVA. Le rapport reconnaît que les administrations sont confrontés aux difficultés de réaliser un contrôle sur des opérateurs virtuels et ne disposant pas d’établissements stables en France.
Le rapport souligne également les risques de fraude liés au travail détaché et à son cadre juridique particulièrement complexe. Le travail détaché permet à un employeur établi dans un État membre de l’Union européenne de faire travailler un de ses salariés dans un autre État pour une période limitée, tout en gardant les règles sociales de son État d’origine.
Pour finir, la cour des comptes pointent l’insuffisance de coopération interministérielle en matière d’échange d’informations, elle constate « des efforts ponctuels et inégaux ».

Les recommandations alertes du rapport 2019 de la cour des comptes

Des moyens à donner à l’administration

La cour alerte sur les quelques chiffres témoignant d’une baisse d’efficacité l’administration ces dernières années. Les montants notifiés et recouvrés sont passés respectivement de 18 milliards d’euros et 10,1 milliards d’euros en 2013 à 16 milliards d’euros et 8 milliards d’euros en 2018. En 2018, plus d’un contrôle fiscal sur place sur 4 donne lieu à un résultat nul ou quasi-nul, le nombre de condamnations pour fraude fiscale a baissé de plus d’un tiers depuis 10 ans. Bien que plus sévères, les suites judiciaires sont marquées par une baisse du nombre de condamnations pour fraude fiscale.

La DGFIP a certes amorcé une démarche de spécialisation de ses services pour mieux combattre certaines fraudes spécifiques, mais son organisation continue de reposer sur des échelons locaux généralistes. Cette organisation très déconcentrée de l’ensemble de la chaîne du contrôle fiscal ne favorise pas la lutte contre la fraude la plus complexe et ne permet pas l’utilisation la plus efficiente des moyens disponibles.
À ces difficultés s’ajoutent des règles de gestion des ressources humaines rigides et un effort de formation insuffisant qui ne permettent pas toujours de disposer des compétences les plus utiles là où elles seraient nécessaires. Enfin, la baisse des effectifs de la DGFIP, et plus particulièrement du nombre des vérificateurs (de 4 260 en 2013 à 3 812 en 2018) a conduit à une diminution du nombre de contrôles sur place, qui n’a pas été compensée par l’amélioration de leur efficacité.

Les axes d’améliorations pour la cour des comptes

La cour des comptes fait état de nombreux axes d’améliorations concernant la lutte contre la fraude fiscale. L’une des choses à retenir est qu’elle considère que le chiffrage de la fraude fiscale est à poursuivre compte tenu du faible délai qu’elle a eu pour établir ce rapport.
La lutte contre la fraude est un domaine qui reste à encadrer malgré les progrès et les nombreuses législations qui ont été promulguées pour enrayer ce phénomène. Les effets néfastes de la fraude fiscale doivent pousser le gouvernement à donner davantage de moyens à l’administration fiscale. En outre, tel que recommandé par la cour, un plan d’action est à programmer sur le fondement du triptyque suivant : évaluation, prévention et répréhension.


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